Je suis assez amusé par la tournure qu'a prise l'intrusion de la médecine générale dans l'enseignement universitaire et sur la vision impérieuse et grandissime que certains attribuent à cette "spécialité".
Je commence par la conclusion. Pour moi l'entrée de la MG à la fac est comme l'intégration aux ECN des postes de MG : une réponse à un besoin de reconnaissance d'une partie de la profession qui a besoin de se sentir vivre.
Pour l'étudiant c'est finalement un problème qui ne devrait le concerner que de loin.
@michelarnould77 m'adressait ce message sur twitter
@remede_org Apprendre la médecine sur 5% de patients qu’on ne verra jamais et ne rien apprendre sur les 95% ? Tu as raison c’est idéal !
En un tweet tout est dit :
- Ce généraliste pense enseigner de la médecine générale. Mais la médecine générale n'est rien d'autre que toute une série de pathologies divisibles par spécialité. Le problème de la fac n'est pas qu'il n'y ait pas d'enseignement de médecine générale (ce qui ne veut pas dire grand chose), mais c'est surtout que les spécialistes n'enseignent souvent pas les pathologies basiques de leur domaine (et qu'elles ne sont pas au programmes des ECN et que donc cela n'intéresse personne)
- L'autre point, c'est - pardonnez moi de la brutalité de la chose - qu'on se fout des 95% des patients. Un bon suivi de diabétique ou d'hypertendu ne demande pas 10 ans d'études. Les choses deviennent même tellement protocolisées qu'une IDE y suffirait souvent. Le vrai problème c'est justement les 5%. Le vrai problème c'est d'avoir vu une maladie Horton pour ne pas classer la mamie en céphalées simplex pendant 5 ans. Le vrai problème c'est de ne pas laisser un gamin fébrile avec trois taches purpuriques repartir à la maison. Le vrai problème c'est encore de savoir qui des 5 dépressifs vus dans la journée ira potentiellement se pendre la nuit suivante.
Tout ce qui est important, tout ce qui fera basculer l'avenir d'un patient du cercueil à la vie s'apprend à l'hôpital. Penser dans ce cadre que la médecine générale a quelque chose à enseigner est illusoire. Je me fous que le généraliste de mes filles traite bien les rhinos. Je veux juste qu'il n'ait pas de doute sur une palpation de fosse lombaire ou une nuque un peu raide le jour venu.
Voila pourquoi je pense que le stage chez le généraliste, et plus largement l'enseignement de la médecine générale, n'a pas grand sens en terme de formation. L'essentiel, c'est la compétence. L'essentiel c'est d'avoir vu suffisamment, expérimenté beaucoup, et de ne pas oublier. La médecine générale ne concentre pas quotidiennement assez de cas pour forger une expérience formatrice. C'est une certitude, elle est purement statistique.
Bref, la conclusion est la suivante : l'étudiant a besoin de connaitre les conditions d'exercice du MG pour voir si ce type d'exercice peut lui convenir. Pour ça il faut 15 jours de stages. Au delà, c'est l'illusion : celle qu'on va remplir les déserts, celle que stage chez le MG puisse rimer avec formation.
Libre à certain dans la profession de se construire des rêves de grandeur, de reconnaissance, ... mais si on ne veut pas des médecins nuls, il leur faut une formation solide et concrète d'expériences. Je mets donc au défis mes confrères de pouvoir l'apporter au cabinet du généraliste avec un ratio acceptable apprentissage/temps passé.
Alors , qui ?